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mes petites paroles intérieures/extérieures
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  • c'est tout comme la main et le revers de la main, le décor et l'envers du décor, l'intérieur et l'extérieur, le dedans et le dehors, le drame le poème : deux registres qui régissent le monde, deux dimensions qui nous montrent la vie en gros plan.
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mes petites paroles intérieures/extérieures
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26 juillet 2006

Lettre intérieure à Massonnet, mon frère !

sounda_3


Mon frère !
Je préfère t'appeler mon frère tout court,
Plutôt que d'ajouter...de sang, comme tu aimes à le faire :
Mon frère de sang (sic !)
J'ignore le sens tu donnes à ce mot déjà lourd de sens.
Je préfère dire mon frère,
Plutôt que d'ajouter trois litres de sang,
L'amour n'en sera pas moins grand...
La vérité c'est que je n'ai plus assez de sang tu vois.
J'en ai trop donné ces temps-ci :
Un litre au Kongo-Kinshasa
Trois litres à Gaza,
Trois autres litres au Darfour,
Un quatrième au Liban.
Tu te rends compte tout ce sang qui court,
Ce sang qui fuit à la vitesse d'une balle de kalashnikov ?

Hier soir encore
Ils sont venus me demander dix litres...
Dix mômes à sauver.
Tu te rends compte?

Revenons à toi.
Cette nuit pendant que je ronflais,
Tu es venu déposer un mot au pied du lit.
Puis tu es resté une longue minute à me regarder ronfler.
En vérité je ne ronflais pas.
Je réflechissais.
J'aime réfélchir en ronflant.
Les idées glissent très vite.
Je t'ai vu sortir de la chambre en croisant tes pieds.
Tu n'as pas voulu me réveiller.
J'ai ri un peu...

Mon frère,
J'ai lu ton mot dès que tu as refermé la porte derrière toi.
Première phrase de ton mot :
Ah sounda mon frère,
Ta route a été longue hein ?
Deuxième phrase :
Longue et pénible mon sounda !...

Vrai.
Elle a été longue ma route.
Pénible  à certains endroits, à cause des nids de poule.
Mais tu sais : je le savais qu'elle allait l'être.
Depuis le début je le savais.
Te souviens-tu
Je suis né par les pieds
Un certain jeudi trois mai à une heure improbable.
Jeudi dans le calendrier des gens de mon village, c'est le jour des  marcheurs :
Ceux qui vont au delà des montagnes et des roulettes,
Ceux qui arpentent les sentiers qu'on a pas encore battu à mort,
Ceux qui partent le matin et reviennent le lendemain soir...

Mais ne va croire
Qu'elle n'a été que sueurs et larmes ma route
Que non mon frère !
Elle fût surtout exquise, à cause des rencontres.
Des rencontres vraies, simples, indélébiles, humaines.
Tu sais, faire une vraie rencontre n'est pas du tout donné.
Grand père Talansi me disait : ah ça se mérite.
Y en a qui sont tombés sur des tyrans, des fuyards,
D'autres qui ont croisé le fer avec des cruches, des roublards...

J'ai rencontré les Peulhs
Ces gens délicieusement humains.
J'ai dansé avec eux, une nuit de grande chaleur,
En me demandant si demain allait etre fait de pastèques,
Ces fruits si juteux du désert...

Les Peulhs,
Ces grands voyageurs !
Ils te donnent la main sans se demander
Ce qu'elle adviendra demain matin...

J'ai épousé une Touareg sur le chemin.
Un vrai délice une Touareg !
La vie est tellement délicieuse à ses côtés !
Plus de matins truffés d'angoisse
Plus de nuits enrhumées !
Mais quand je dis "épousé" une Touareg
C'est de la pensée Touareg dont je voudrais te parler :
la philosophie Touareg,
l'oeil Touareg sur le monde, notre monde.
Un vrai bonheur en vérité !

Je sais
Tu t'es demandé :
Pourquoi le Sahara au lieu de Boulogne,
Pourquoi Toumbouctou au lieu de Palaiseau-sur-bras-de-mer.
Pourquoi, pourquoi, pourquoi ?...

 

La vérité est là :
Je suis allé à la recherche d'un petit rien
Ce petit rien pour le quel on sent si fier d'avoir vécu :
La richesse de l'âme.
Ponton-la-Bière m'a tant appauvri !
Il fallait partir...
A la recherche de ce fromager
Dont les feuilles ne sont pâs des feuilles de fromager
Mais des bouts d'âmes sagement accrochées les unes sur les autres.

Au pied du fromager
J'ai rencontré un très beau Dogon
Très beau à l'intérieur.
De lui j'ai appris une chose éssentielle :
Progresser dans la vie ne veut nullement dire
amasser des accessoires, des applaudissements, des lauriers,
des félicitations, des hourras, des feuilles mortes, des...
Oh que non !
Progresser c'est savoir gerer ses échecs,
pour en faire demain des signes de vie et d'amour
qui serviront à la prosterité !...

Mon frère,
Il y a des voyages qui remplissent le ventre
d'autres qui vous grisent la tête.
Le mien m'a mis plein d'étoiles dans les yeux.
Le mien m'a fait pousser des bottes de foin dans le coeur.
Le foin.
C'est précieux le foin !
Précieux pour les chevaux.
Précieux aussi pour les humaux.

Bon vent à toi mon frère !
La dernière phrase de ton mot m'a fait sourire :
J'irai un de ces quatre chercher le sentier qui déscend jusqu'à chez toi.
Allez va je t'attends, Massonnet !

sounda_4

 

Chut,  regarde par la fenêtre !
Une image
Un moment de vie
Cent mille mots d'amour
Gravés sur la voie qui va à Yongo,
Le village de mon père.
Allez, salut, Massonnet !


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